• TRISTE GRISAILLE !

    (Poème qui ne finira qu’à minuit)

    Il est minuit ! fin et à demain !

     

    7h

     

    La grisaille de ce ciel d’automne

    Étouffe mon âme et mon esprit

    Rien désormais ne m’étonne

    Rien dont je pourrai être épris

    Ma plume erre en désert, chiffonne

    Je ne lis plus ce qu’elle écrit !

     

    7h 30’

     

    Ce ciel n’a plus qu’une couleur

    Et rien n’y brille ne brille jamais

    Ses nuages sont-ils porteurs

    De cette pluie que jadis j’aimais

    Ou de larmes sans aucune chaleur

    Qui vont couler sans rien à exhumer

     

    8h

     

    La mort s’approprie la nature

    Effaçant ses couleurs éclatantes

    Faisant d’elle sa triste demeure

    D’où elle diffuse sa brise puante

    Étouffant ses sublimes senteurs

    Par l’odeur de ses tombes béantes

     

    Mon âme, telle ses arbres effeuillés

    Ignorant comment sera demain

    Journée belle ou triste et endeuillée

    Par l’absence des beaux matins

    Par ces prairies devenues rouillées

    Où la verdure est un souvenir lointain

     

    9h 30’

     

    Je cède, je me laisse envahir

    Par ces épaisses brumes grises

    Il n’y aura plus d’astres pour luire

    Il n’y aura plus de joie qui grise

    La vie n’est plus qu’un long délire

    Une suite désordonnée de bêtes sottises !

     

    10h

     

    Aujourd’hui, je nourris mes angoisses

    Des sombres fruits de ma solitude

    Rien, plus rien ne me froisse

    Car j’en pris la triste habitude

    Veuf d’une joie devenue une poisse

    Avant de succomber à ma lassitude

     

    11h 45’

     

    Il m’arrive de ne plus avoir peur

    De ne plus avoir aucun espoir

    J’ai perdu mes goûts d’admirateur

    D’une vie offerte en robe grise et noire

    J’ai tué tous mes sens approbateurs

    Unissant mes échecs aux piètres gloires

     

    12h 15’

     

    Lourde est la déprime que j’ai trainée

    Durant des jours en boucles noires

    À tel point qu’elle m’a parrainé

    Et juré de ne jamais me laisser choir

    Aujourd’hui, je deviens son aliéné

    Mon ultime et reposant isoloir,

     

    15h 40’

     

    Lugubres sont ces crêtes cachées

    Que les oiseaux ne peuvent franchir

    Tant de belles visions y sont fauchées

    Laissant une grande tristesse surgir

    Les belles nuances excédées ont lâché

    Laissant à la grisaille le pouvoir d’agir

     

    17h 30’

     

    Matin ou soir, c’est le même visage

    Que le ciel offre en ces jours moroses

    Longs fleuves aux identiques rivages

    Où ne germent pas les grains des roses

    Longs chemins sans aucun virage

    Ne menant que vers les portes closes !

     

    Une journée va bientôt mourir

    Sur le point d’éteindre sa lumière

    Céder à sa brève agonie et partir

    Sans laisser rien de beau derrière

    Stérile et n’ayant pu rien offrir

    Sauf ce froid digne d’une glacière

     

     

     20h

     

    Ô nuit, récipient des mes chagrins

    Je m’offre à toi, à ta noire plénitude

    Tu arrives avec tes tristes refrains

    Tes airs mélancoliques, tes inquiétudes

    Et les augures d’un demain contraint

    À m’exiler dans ses vaines vastitudes !

     

    Nuit ! ô nuit, pourquoi eu es partiale ?

    À ceux que tu aimes, tu ouvre les paradis

    Les chartreuses des romances sans dédales

    Aux autres les enfers de tes démons maudits

    À ceux que tu aime, tes belles vestales

    Aux autres les vampires de tes taudis

     

    20h 15’

     

    Ô nuit, est-il vrai que pas loin de moi

    Une âme suit la mienne comme son ombre

    Comme un ange qui la couvre d’émoi

    Qui ne demande qu’à se laisser prendre

    Jouir des délices que recèle le don de soi

    Une âme me guettant avec des yeux tendres

    Alors que tu me laisse endurer ton froid

     

    23h 10’

     

    Ô nuit ! N’est elle pas que l’ébauche d’un rêve

    Que tu viens d’ajouter au jardin des mes songes

    Une tige vivante, à laquelle tu injecte ma sève

    Sans jamais voir son illusoire fleur d’orange

    Ô nuit, n’est elle pas qu’une charitable trêve

    Une récréation hors de ton horrible grange !

     

    24 H (Fin)

     

    Il est temps pour ma douce horrible nuit

    De plonger dans tes rêves et tes chimères

    Être l’amant de ta tristesse qui me suit

    Seul dans sa vielle citée sans réverbères

    Sans étoiles, sans astres ou lune qui éblouit

    Tu es mon piètre lot, ma folle conseillère

     

    © Assou OUCHEN

    © JePoeme.com, 

     


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